De par mon expérience de praticienne en massage bien-être et réflexologie depuis 20 ans, ainsi que celle de mes élèves en tant que formatrice depuis 10 ans, et plus récemment, dans le cadre de mon engagement au sein de la FFMBE, j’ai observé, lors de rencontres entre adhérents et conseils d’administration de la fédération, que la question des demandes ambiguës revient fréquemment, notamment lors des échanges avec des praticiens récemment installés.
Discuter de ce sujet ensemble permet à ces praticiens de comprendre qu’ils ne sont pas seuls dans cette situation, de prendre du recul, et de réaliser que le problème réside davantage dans une posture intérieure et des représentations sociétales que chez eux.
Je suis pleinement consciente de l’existence de demandes de prestations sexuelles adressées aux professionnels du massage bien-être, ainsi que des répercussions néfastes et du sentiment de solitude qu’elles peuvent engendrer. Il me semble donc essentiel d’aborder cette question afin que de nombreux professionnels puissent s’y préparer, en évaluant leur propre rapport aux émotions et en revisitant leur propre histoire.
Cela contribuerait à changer la donne en évitant que la déstabilisation et la peur ne pèsent uniquement sur les praticiens.
Afin d’illustrer cette problématique, je partagerai ma première confrontation avec une demande ambiguë.
Après avoir suivi une formation de 100 heures en massage (californien, coréen, réflexologie thaï et massage thaï), comprenant 50 heures de pratique, ainsi qu’une formation de 200 heures en relaxologie appliquée, je me suis installée en tant que relaxologue et masseuse. À l’époque, la sexualité et les propositions sexuelles n’avaient jamais été abordées dans mon cursus.
Guidée par l’idéalisme de la jeunesse et ma relative naïveté professionnelle, j’ai été recommandée par une amie à son conjoint, un coach sportif, dont un client était intéressé par un massage à domicile. Enthousiaste et pleine d’entrain, je me suis rendue chez le client, après que le coach sportif m’ait présentée. Cependant, la situation a pris une tournure inconfortable lorsque le client a proposé de recevoir le massage dans sa chambre, en sous-vêtements, ce qui n’était pas approprié pour un massage coréen au sol habillé. Malgré mon malaise, j’ai expliqué la nature du massage et proposé de l’installer dans le salon, une pièce plus adaptée.
Au cours de la séance, j’ai maintenu ma concentration malgré les tentatives du client de m’orienter vers une direction inappropriée. Bien que le massage se soit déroulé sans incident majeur, cette expérience a laissé une empreinte durable, m’incitant à être plus vigilante face à de telles demandes.
Je pourrais partager une dizaine de situations similaires survenues au fil des ans, mais aucune n’a dégénéré. Ces moments sont désagréables, nécessitant un recentrage, la gestion d’un malaise intérieur, voire une éducation du client si nécessaire.
Les réactions des hommes ayant fait de telles demandes ont été généralement neutres ou gênées, sans violence ni menace. Avec le temps, ce type de personnes semble moins présent dans ma clientèle, bien que je reçoive encore occasionnellement des appels de ce genre 2 ou 3 fois par an.
Il est important de noter que le receveur, en tant que personne dénudée, allongée et immobile sur une table en hauteur, est plus vulnérable que le masseur, habillé, debout et mobile. Ne pas céder à la peur, savoir adopter une position ferme, et être capable de détecter par téléphone toute demande inappropriée lors de la prise de rendez-vous en précisant clairement : « La prestation que je propose n’est pas à caractère sexuel ».
Se positionner fermement intérieurement est la clé pour ne pas avoir de demande. Ayez confiance en vous.
BRAVO ! pour ce témoignage très complet.
Bravo pour la clarté de l’article !
Nous avons eu aujourd’hui avec mes stagiaires en Massage Californien au sein de l’école Mains du Monde un long échange sur ce thème. En fait, ce thème est central lors des formations et les stagiaires très soulagés de pouvoir aborder le sujet. Plus les praticiens MBE seront à même de gérer ces demandes, explicites ou pas, plus les contours de la profession seront clairs et les mentalités pourront évoluer
Merci pour cet article, je suis en formation en ce moment même avec des stagiaires et nous avons abordé ce sujet hier !
J’aborde ce sujet systématiquement pendant la formation c’est une séance de formation qui s’inscrit dans une séquence que j’appelle la » posture professionnelle » dont le but est que le futur praticien apprenne à se positionner dans la relation client et avec tous ces enjeux. Car il ne s’agit pas que de « l’autre » et de son besoin.
Se positionner clairement, sainement et sereinement dans cette relation client permet de faire face à de nombreuses sollicitations inadaptées. Nous abordons lors de ces séances : les motivations intrinsèques pour l’exercice de ce métier, la communication, la tenue vestimentaire, l’image de soi, les limites et seuils de respect mutuel afin de construire une posture « solide » et professionnelle sans équivoque. Comprendre à quel niveau « ça se joue » pour chacun de nous, dans le cas d’une demande inadaptée, donne la possibilité de réagir de manière adaptée et efficace ….
Voila en bref comment nous abordons ce sujet .. nous utilisons aussi le jeu de rôle qui est un outil très parlant !!!
Dolorès Brottin IFJS.
Bonjour,
Cet article résume bien les demandes auxquelles nous sommes confrontés et la question fondamentale du positionnement à laquelle la FFMBE travaille depuis de nombreuses années, et en tant que masseuse professionnelle je vous remercie pour ce travaille.
Il me semble toutefois que de toujours pointer du doigt les salons de massage est un peu facile et qu’on oublie qu’il y a aussi un gros travail à faire au sein même de notre profession !! Un travail d’éducation et la volonté de faire passer le bien-être et l’intégrité des masseurs et masseuses avant celui des clients et de la chasse au C.A.
J’ai travaillé comme Freelance pour des agences en région parisienne qui placent des masseurs.euses dans des hôtels 4* 5* à la prestation. Il n’est pas rare pour ces agences d’envoyer des masseuses faire des prestations en chambre (même si l’hôtel dispose d’un spa avec salle de massage – et ça ne choque personne puisque le client le demande et qu’il paie) ou encore en chambre ET sur le lit car il n’y a pas la place de mettre une table de massage dans la chambre (là encore ça ne choque personne, ni l’agence, ni l’hôtel – on ne va quand même pas passer à côté de l’opportunité de se faire un peu d’argent en proposant quand même des prestations de massages !). Il y a les demandes de massage la nuit aussi …
Lors des entretiens pour ces agences (qui souvent sont tenues par des anciens masseurs qui sont donc sensés connaitre le métier et se mettre à notre place) il n’est pas rare non plus de s’entendre dire qu’on n’est pas assez maquillée ou que notre tenue n’est pas assez féminine…
Ce ne sont que quelques exemples qui me semblent contribuent aussi à créer une ambiguë sexuelle et peu professionnelle du massage et que ce sont pourtant des professionnelles qui y contribuent.