De la bien-traitance à la relation d’accompagnement

Holistique vient du grec, holos, qui signifie la totalité, l’entier. L’approche holistique consiste à prendre en compte la personne dans sa globalité plutôt que de la considérer de manière morcelée.

Le thème de cette réflexion est celui du positionnement du praticien entre laisser être et accompagner, agir et accueillir, recevoir et donner. Si l’attitude bienveillante dans la relation entre praticien et client s’impose naturellement, elle porte malgré tout en elle le germe de la maltraitance : imposer à l’autre sa propre vision du bien-être par exemple ! Le client ne se trouve-t-il pas alors confronté à une forme d’ingérence de la part du professionnel ? Cette intrusion peut-elle être dénoncée, quoiqu’elle parte de l’intention « de faire du bien à l’autre » ?

Plus le praticien en massages-bien-être pense savoir « ce qui est bon pour l’autre », plus le risque d’une relation déviante se révèle. Qu’il soit enclin à croire qu’il sait ce qui est « bon » pour son client, et c’est l’amorce d’une relation génératrice de violence. C’est ainsi que le professionnel ne peut pas faire l’économie d’une réflexion profonde sur sa pratique, son positionnement et son éthique. Un travail de clarification du positionnement et de la qualité de la relation avec le client s’impose. C’est un point- clef qui doit être abordé très vite en début de formation. Une idée bien-pensante est généralement présente chez de nombreux stagiaires : masser pour faire du bien et soulager l’autre. Redoutable symptôme d’une relation de soin, et fort éloigné de la notion de bien-être. N’est-ce pas alors soumettre le client à « un traitement pour que les choses s’améliorent en lui » ?

Cette attitude relève le plus souvent de la méconnaissance, voire d’un comportement de pouvoir, avec pour conséquence une infantilisation du client et une limitation de sa liberté. C’est pourquoi il faut souligner l’importance du positionnement, de la non-intention et de la juste distance dans la relation avec le client. C’est une question de respect de la personne.

La rencontre entre un client et un praticien en massages-bien- être comporte inévitablement la mise en route de deux parcours de vie ; il est essentiel que ce qui, de l’un et de l’autre, s’investit dans la relation, soit soigneusement observé et distancié. Qu’est-ce que le praticien est en train de jouer dans l’histoire de cette rencontre ? En quoi son parcours de vie modifie la perception qu’il a du client ? Quelles motivations personnelles influencent son acte relationnel avec l’autre ? Qu’est-ce qui caractérise cette alliance relationnelle ?

Entre ce que nous recevons et donnons, un dialogue conscient et inconscient s’engage. Chacun le vit en fonction de ce qu’il est, un jeu de miroirs s’installe, plus ou moins déformant, au gré des croyances, des conditionnements, des situations affectives et relationnelles non réglées.

Accepter le fait que tout professionnel interagit avec le monde conscient et inconscient du client est une première étape. Prendre conscience, que nous le désirions ou pas, que chacun a un impact dans la relation. Que celle-ci soit de toute puissance (« je sais ce qui est bon pour l’autre ») ou « d’accueil du client tel qu’il est, là où il en est », la résonance ne sera évidemment pas vécue de la même façon, pour l’un comme pour l’autre. La bien-traitance dans une relation invite à s’interroger sur le sens de ce qui se déploie, s’échange et se communique. C’est en ces termes humanistes que la relation d’accompagnement émerge. En ne cherchant pas à définir ce que serait le bien-être pour l’autre, mais plutôt à se donner les moyens d’interroger son positionnement et la qualité de la relation qui s’établit, le professionnel crée de l’espace, de la flexibilité, et permet l’émergence de l’altérité.

C’est précisément dans cet entre-deux, conséquence d’un travail permanent d’ajustement, que la dynamique de bien-être se fait jour et s’impose.

Abandonner l’idée que l’on peut « faire le bien d’autrui », orienter l’énergie vers une requalification de la relation s’avère être la base d’un échange bien-traitant, adulte, humaniste et tolérant. Chacun, professionnel et client, devient coréalisateur d’un processus gagnant, équilibrant, structurant et évolutif. C’est la création d’une distance bienveillante où chacun est à sa place, libre de ses mouvements internes, réceptif à ce qui est en œuvre, où toute quête d’une vérité pour l’autre disparaît.

Source

Par  Roger DAULIN/ paru dans La Massagère / Numéro 13 / 2013.

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