La main
Elément primordial du corps humain, la main est à la fois outil, langage et expression de notre vécu intérieur.
Elément primordial du corps humain, la main est à la fois outil, langage et expression de notre vécu intérieur. La main évoque les nuances subtiles de la personnalité. Par les postures infinies qu’elle adopte, elle dévoile le lien indéfectible qu’elle entretient avec la parole. Elle lui apporte le soutien dont elle a souvent besoin en l’étayant, en la complé- tant. Mais dans sa dualité, la main peut aussi trahir l’expression de la parole et révéler un non-dit. Auxiliaire obligé, la main peut malgré tout, à chaque instant, reprendre sa liberté…
La main se substitue à la parole lorsque celle-ci devient inaudible. Elle désigne du doigt ou manifeste ce que la parole n’articule pas. Elle participe de fait au langage. Elle contribue même à en augmenter la portée en mimant, soulignant ou en scandant. Elle devient langage pour les sourds-muets comme elle s’élève au rang de la spiritualité en priant ou en invoquant.
La main, grâce à son architecture anatomique, dispose d’une capacité à toucher et d’une faculté à saisir. La peau très fine à cet endroit du corps, recèle quantité de récepteurs notamment au bout des doigts. Précisons que ce qui est tendu ou saisi par la main est de l’ordre de l’incarné, du manifesté. Et de fait le mot manifestation dispose de la même racine que main.
Nous l’expérimentons d’ailleurs chaque jour, la main peut prendre, posséder, transmettre, congédier, accuser, féliciter mais aussi réconforter, sécuriser, écouter, accueillir… Elle est, à l’infini, un outil d’expression inégalable.
Dans la main vient naître ce qui anime notre intériorité. Elle extériorise les nuances innombrables des sensations qui nous traversent, des émotions qui nous éveillent, des sentiments qui nous échauffent. La main révèle nos états d’âme et témoigne de la véracité de ce qui est éprouvé. Par sa capacité à exprimer et à incarner, elle suscite de nombreuses causes et effets dont les conséquences sont tout aussi multiples qu’imprévues.
Si Hegel affirmait que « la main de l’homme est l’artisan de sa fortune », elle dévoile aussi le monde dans lequel elle évolue. Chacune de ses expressions est le reflet de ce à quoi nous croyons. Elle est un merveilleux et parfois envahissant agent d’expression du faire, du dire et de l’agir. Cependant, si la volonté d’action fait la main, la main fait la grandeur d’âme…
La main enrichit son maître. Lorsqu’elle ne s’affaire pas, ne conçoit pas, ne produit rien, elle révèle le niveau de conscience de sa vie intérieure. Elle met ainsi au grand jour sa possibilité ou non d’accueillir l’autre tel qu’il est, là où il en est. C’est encore Hegel qui disait que la main est pour l’homme « l’organe actif de son perfectionnement ». Elle symbolise le donner et le recevoir. Elle est l’expression intime de ce qui s’agite ou s’apaise en soi. Elle véhicule l’empreinte qui fait de chacun de nous un être singulier… Et n’oublions pas que nos transformations intérieures viennent de ce que l’on reçoit et non de ce que l’on prend.
Lorsque la main est dans « l’ouverture et la nudité » une réelle rencontre avec l’autre est possible. Seule une main allégée d’un vouloir, d’un pouvoir, devient accueil et don. Si la main accepte ce qui est là, sans jugement, elle glorifie le mouvement même de la vie. Elle participe à l’expérience profonde de celle-ci.
Si la main confère au toucher sa véritable vocation, la qualité d’accueil de celle-ci fait la grandeur d’âme…
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